De l'hyper-croissance à la méthode, réinventer la levée de fonds
- Charlotte Combet
- 10 avr.
- 5 min de lecture

Entre la fin des bulles spéculatives, l’essor de l’intelligence artificielle et les défis d’hypercroissance, lever des fonds devient un véritable parcours du combattant. JL Partner, fondé par un multi-entrepreneur aguerri, apporte une réponse pragmatique à ces enjeux : accompagner les dirigeants dans leur levée de fonds et accélérer leur croissance grâce à une méthodologie éprouvée.
Informations Entreprise : Depuis la crise du Covid, quelles évolutions majeures avez-vous constatées dans les exigences des investisseurs ?
Joffroy Louchart (CEO de JL PARTNER et de Think 10x) : Ces dernières années, nous avons connu plusieurs bulles de marché. J’ai moi-même vécu celle du pivot vers le SaaS, une période d’euphorie où les valorisations étaient démesurées. Puis est arrivé le Covid, avec son lot de bouleversements économiques. Cela a conduit les investisseurs – qu’il s’agisse de venture capitalists, de business angels ou même des banques – à se recentrer.
Aujourd’hui, ils sont plus sélectifs, notamment sur les phases précoces de levée de fonds (pré-seed et seed). Dans les term sheets, on voit apparaître des clauses qui, auparavant, concernaient des séries plus avancées (A, B, C). L’époque où l’on pouvait lever des fonds sur un simple pitch deck est révolue. Désormais, il faut des preuves tangibles. Cela dit, ce n’est pas une mauvaise chose : cela force les entrepreneurs à structurer leur projet plus solidement avant d’arriver en discussion.
I.E : Quels sont, selon vous, les éléments essentiels qu’un entrepreneur doit absolument mettre en avant pour convaincre un investisseur ?
Joffroy Louchart : L’un des principaux freins pour les entrepreneurs en recherche de financement, c’est leur capacité à vendre leur projet. Beaucoup d’entre eux, notamment dans les secteurs technologiques, ont une forte expertise produit mais peinent à exprimer une vision claire et ambitieuse.

Or, ce que cherche un investisseur, ce n’est pas seulement une bonne idée ou une technologie performante, mais un projet structuré avec une trajectoire lisible. Il veut comprendre où l’entreprise peut aller dans trois, cinq ou dix ans, car son objectif est d’entrer au capital pour une période limitée et de maximiser la valorisation. Trop souvent, les entrepreneurs pensent que lever des fonds, c’est juste obtenir du financement. Mais sans une vision forte et inspirante, leur pitch deck manque d’impact. L’investisseur achète avant tout une équipe, un leader capable d’incarner un projet ambitieux.
I.E : Quelles sont les étapes essentielles à suivre pour maximiser les chances de succès d’une levée de fonds ?
Joffroy Louchart : Une levée de fonds réussie repose sur une approche rigoureuse et méthodique. Tout commence par une vision claire : il faut savoir précisément pourquoi on lève des fonds et comment ils seront utilisés, que ce soit pour accélérer la croissance, innover ou s’internationaliser. Ensuite, il est essentiel de constituer un dossier solide, avec un business plan détaillé, des projections financières crédibles et un pitch deck impactant.
Le choix des investisseurs est tout aussi stratégique : il faut cibler ceux qui partagent notre vision et qui apportent une réelle valeur ajoutée, au-delà du capital. Une structuration intelligente du financement, combinant solutions non dilutives et investisseurs privés, permet d’optimiser la levée. Enfin, la préparation de la due diligence et la négociation des termes d’investissement sont des étapes cruciales. Une bonne anticipation permet de sécuriser un partenariat équilibré et bénéfique à long terme.
I.E : Comment votre propre parcours entrepreneurial vous a-t-il conduit à créer JL Partner?
Joffroy Louchart : JL Partner, c’est la suite logique de mon parcours entrepreneurial. J’ai eu la chance de co-fonder FinalCAD, une startup qui a levé 70 millions de dollars et atteint le Next 40, un label prestigieux pour les futures licornes françaises. J’ai vécu l’hypercroissance, multiplié les voyages pour structurer une expansion internationale et géré les défis d’une entreprise passant de 0 à 200 collaborateurs. Ce parcours m’a appris qu’au-delà de la levée de fonds, la clé du succès repose sur une vision claire et une stratégie de croissance structurée. Aujourd’hui, j’accompagne des entrepreneurs qui veulent scaler rapidement en leur transmettant des méthodes éprouvées. Beaucoup d’obstacles sont psychologiques : on s’impose des barrières qui freinent l’ambition.
Mon rôle est de les aider à lever ces freins et à penser plus grand. Si j’avais eu cette méthodologie à l’époque, j’aurais gagné cinq ans. Aujourd’hui, je la partage pour accélérer la réussite des autres.
I.E : Pouvez-vous nous partager des exemples concrets où votre accompagnement a permis à des entreprises de franchir un cap décisif en matière de levée de fonds ou de stratégie de croissance ?
Joffroy Louchart : J’ai récemment accompagné deux entreprises dans des contextes très différents, mais avec un point commun : l’importance d’une vision claire et d’une stratégie bien structurée.
La première évolue dans le secteur des e-bikes, un marché qui a connu une bulle spéculative. Beaucoup d’entreprises misaient sur la vente en ligne, mais avec seulement 4% des consommateurs achetant leur vélo sur Internet, ce modèle montrait ses limites. Cette entreprise a su proposer une approche hybride : une présence en ligne couplée à une expérience en boutique immersive, un peu comme Ikea. Grâce à cette stratégie différenciante, nous avons sécurisé une levée de fonds qui va permettre d’ouvrir plusieurs centres en France. Leur innovation majeure ? La création de Cote Vélo, le premier Argus des vélos, un concept inspiré du marché automobile.
La seconde entreprise proposait initialement des services sans réelle vision définie. Après un travail de structuration, nous avons clarifié leur stratégie long terme et les avons fait pivoter vers un modèle SaaS. Résultat : leur valorisation est passée de x2 à x6, renforçant leur positionnement comme acteur majeur du marché.
I.E : Comment envisagez-vous de faire évoluer la méthode Think 10x pour qu’elle touche un maximum d’entrepreneurs à l’international ?
Joffroy Louchart : Avec Think 10x, mon ambition est d’élargir l’impact de la méthode bien au-delà de mon propre réseau. Mon temps étant limité, j’ai réfléchi à un modèle scalable, similaire à une startup qui passe en phase de scale-up. La première étape consiste à certifier des partenaires – des entrepreneurs ayant vécu des succès et des échecs – pour qu’ils diffusent la méthode Think 10x à travers le monde. Nous avons déjà des pistes d’expansion en Amérique latine, aux États-Unis et en Asie.
En parallèle, nous développons une plateforme digitale qui ira encore plus loin en intégrant l’intelligence artificielle et une vingtaine d’années d’expérience cumulée de fondateurs. L’objectif ? Aider les entrepreneurs à structurer leur stratégie de croissance et maximiser leurs chances de succès dès leur première entreprise.
I.E : Quels sont, selon vous, les secteurs émergents qui vont profondément transformer notre économie dans les prochaines années ?
Joffroy Louchart : Aujourd’hui, nous ne sommes qu’au balbutiement de l’intelligence artificielle, malgré des décennies d’existence de la technologie. La récente levée de 500 milliards de dollars autour d’OpenAI illustre bien l’ampleur du phénomène. L’IA va profondément réorganiser notre manière de travailler et de consommer, et il est essentiel de l’intégrer rapidement dans les modèles économiques pour bénéficier de ses gains de productivité.
Prenons l’exemple du secteur automobile : les véhicules autonomes vont redéfinir l’assurance, car l’accident ne sera plus causé par un humain mais par une machine. Ce bouleversement affectera les modes d’achat et fera évoluer les business models vers un modèle de service plutôt que de possession.
Par ailleurs, je crois beaucoup au potentiel de la deep tech et de la biotech. Ces secteurs, bien que très risqués, sont porteurs des plus grandes disruptions technologiques. Pourtant, on ne soutient pas suffisamment les inventeurs qui pourraient transformer le monde. Il faudrait une culture plus forte de l’investissement dans ces domaines, car sans financement, nous risquons de freiner l’innovation et de passer à côté des révolutions de demain.