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Se former aux nouvelles exigences de l'HPA

Les mutations rapides des pratiques de consommation et les défis liés à la formation professionnelle mettent l’hôtellerie de plein air au pied du mur. Faisons le point sur une situation inédite en compagnie de Thierry Teboul, dirigeant de l’Afdas.


Informations Entreprise : Quels sont les principaux défis auxquels le secteur de l’hôtellerie de plein air doit faire face aujourd’hui ?


Thierry Teboul (Directeur Général de Afdas): Le secteur de l’hôtellerie de plein air est confronté à trois enjeux majeurs. Premièrement, la transformation des pratiques de consommation des clients impose une adaptation significative. Les métiers de l’accueil et de l’animation doivent évoluer pour répondre aux attentes de services plus premium. Cela nécessite une montée en compétences des collaborateurs, notamment en matière de posture servicielle.


Deuxièmement, l’attractivité du secteur est un défi constant. Les métiers de l’hôtellerie- restauration sont traditionnellement perçus comme peu attrayants, en raison de leur caractère saisonnier et en même temps exigeant en termes de disponibilité. Il est crucial de développer un récit sur des parcours professionnels innovants, intégrant des périodes de formation pendant l’intersaison par exemple, pour rendre ces métiers plus attractifs et d’offrir des perspectives de progression de carrière. Enfin, le secteur doit s’engager dans sa propre transition écologique et les dérèglements climatiques associés, et sa responsabilité sociale. Il s’agit de former les équipes aux nouveaux gestes professionnels en adéquation avec la préservation de la nature. L’hôtellerie de plein air, en tant qu’acteur proche de la nature, se doit d’incarner cette transition et de prendre des positions fortes en la matière, y compris pour nourrir sa marque employeur.


I.E : Comment les opérateurs de compétences adaptent-ils leurs missions aux évolutions du secteur de l’hôtellerie de plein air ?


Thierry Teboul : L’évolution du rôle des opérateurs de compétences se structure autour de plusieurs missions essentielles. Premièrement, l’observation prospective de l’emploi, notre coeur de métier. Nous accompagnons la branche en anticipant les évolutions des métiers, afin de concevoir et financer des programmes de formation adaptés.


Deuxièmement, l’ingénierie de parcours et la promotion des métiers. Nous avons développé, en collaboration avec d’autres branches, des programmes valorisant les métiers de l’HPA. Par exemple, la création de capsules vidéo sur le site de la FNHPR met en lumière les parcours de vie et humanise ces professions, soulignant leur réalité et leur progression sociale. Enfin, le financement des actions de formation. Forts de nos observations et parcours élaborés, nous avons pu obtenir des financements complémentaires, notamment des subventions étatiques et régionales. L’HPA étant un secteur fortement ancré dans les territoires, ce cofinancement vise à soutenir des initiatives d’intérêt économique et général.

I.E : Comment la crise sanitaire a-t-elle transformé les pratiques pédagogiques du secteur?


Thierry Teboul : La question de l’innovation pédagogique a pris une dimension systémique depuis la crise sanitaire, qui a durement frappé le secteur de l’hôtellerie de plein air (HPA). Cette crise a accéléré les mutations déjà en cours, notamment en matière de formats pédagogiques. Il a fallu trouver un équilibre entre le présentiel, le distanciel et la formation en situation de travail.


Pendant la crise, nous avons dû repenser nos méthodes de formation à distance. À la reprise, face à une demande forte, il était crucial de continuer à se former tout en travaillant. Cette ambivalence a conduit à des innovations pédagogiques notables, notamment dans la professionnalisation du e-learning, où les formations en ligne sont devenues de véritables actions de formation avec des tests de compétences à distance.

De plus, nous avons innové dans l’ingénierie des parcours de formation pour des secteurs à forte saisonnalité. Il s’agissait de former les collaborateurs pendant les périodes creuses et d’utiliser des outils de formation en situation de travail lorsqu’ils étaient en activité. Enfin, nous avons exploré des initiatives à fort impact social, comme l’intégration de réfugiés dans des campings pour des métiers de restauration et d’entretien. Cela a permis au secteur de découvrir son potentiel d’impact sociétal, tout en répondant aux tensions sur le marché de l’emploi. L’opérateur de compétences joue un rôle clé en faisant l’interface avec les acteurs mobilisés et en recherchant des financements pour mettre en oeuvre ces initiatives.


I.E : Pouvez-vous détailler les mesures prises par l’Afdas pour optimiser les fonds de formation dans un contexte économique tendu ?


Thierry Teboul : La situation s’est nettement tendue ces derniers temps, particulièrement en raison de la loi de 2018 sur la réforme de la formation professionnelle. Si ses effets ont été masqués par la crise sanitaire et les mesures de soutien de l’État, dont un Plan d’Investissement dans les Compétences doté de de 15 milliards d’euros, sur la période 2017-2022, on se rend compte aujourd’hui que cette réforme en régimen de croisière a en réalité restreint les capacités d’investissement dans la formation. Elle a davantage responsabilisé les entreprises quant à l’investissement sur fonds propres, à l’exception notable de l’alternance, qui a bénéficié de financements accrus. Notre défi a été de former mieux avec moins de moyens. Les mutations rapides de notre monde rendent incertaines les compétences de demain, rendant les formations longues rapidement obsolètes. Le secteur a donc opté pour des parcours plus courts et immédiatement exploitables, quitte à les renouveler fréquemment. L’émergence rapide de l’intelligence artificielle illustre parfaitement ce dilemme, où les compétences doivent sans cesse s’adapter à un environnement en perpétuelle évolution. Ainsi, notre rôle consiste à accompagner les branches dans la conception d’offres de formation efficaces et flexibles.


I.E : Comment la mutualisation des moyens et les stratégies de responsabilité sociale impactent-elles la formation dans l’hôtellerie de plein air ? (Cas client)

Thierry Teboul : Pleinement conscientes de la nécessité d’affirmer son impact social et sociétal, les entreprises de la branche ont très rapidement saisi l’opportunité de mobilisation de dispositifs interbranche oeuvrant dans ce sens.


A titre d’exemple, l’Afdas a pu accompagner la fédération régionale Languedoc- Roussillon de l’HPA dans la mise en oeuvre d’un programme de recrutement dé réfugiés sur les métiers d’agents polyvalents avec une double ambition : celle de résorber des problématiques de tensions d’emploi ; conjuguée à celle de prouver son engagement sur des missions d’intérêt général. Le tout en conciliant performance économique et performance sociale. Le programme s’est notamment déployé lors d’une première expérimentation en 2022 sur la région Occitanie. Eu égard à son efficacité en termes de fidélisation et de professionnalisation, l’expérience a inspiré d’autres employeurs en 2023 et 2024.


I.E : Comment percevez-vous l’avenir ?


Thierry Teboul : Tout d’abord, le management va devenir un sujet central. Avec l’émergence de groupes dans l’HPA et la montée en gamme des équipements, la professionnalisation du management, notamment en ce qui concerne la relation client, sera primordiale. Nous devons trouver un juste équilibre entre des outils CRM sophistiqués et des solutions adaptées aux besoins spécifiques des petits acteurs qui montent en puissance.


Ensuite, la flexibilité de l’offre de service est indispensable face aux aléas climatiques. La transformation des emplacements de camping en mobil-homes en est une illustration, mais une adaptabilité accrue sera nécessaire pour répondre aux inquiétudes croissantes liées aux conditions météorologiques. Enfin, la fidélisation des salariés constitue un enjeu majeur. Il est essentiel de construire des parcours professionnels attractifs, permettant de faire carrière dans le secteur. Cela implique de proposer des formations et des progressions de carrière claires, ainsi qu’un marketing RH efficace pour attirer et retenir les talents.


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